mardi 16 septembre 2025

Avenue des mystères - John Irving

 




    Il y a des auteurs, comme John Irving, très connus, très médiatisés, que l'on découvre sur le tard; si tard que sa bibliographie nous échappe et qui, lorsque l'on appréhende enfin son œuvre, se découvre avec son titre le moins bien noté. Et c'est ce qui m'est arrivé avec Avenue des mystères, même si tout cela n'est, en partie, que le fruit du hasard. 

    Parce que j'ai toujours éprouvé une curiosité inexpliquée pour la religion, j'ai été attiré par ce titre dans lequel s'opposent deux statues de Vierges ennemies, l'une blanche, la Vierge Marie, l'autre noire, la Vierge de Guadalupe.

    Parce que j'ai développé une récente affinité pour l'Amérique du Sud, j'ai été attiré par ce titre aux couleurs mexicaines, par les promesses de la ville d'Oaxaca et du pèlerinage littéraire au cœur d'une culture qui m'est mystérieuse - et captivante. 

    Et enfin, attirée par l'histoire, qui retrace celle de Juan Diego, un écrivain américain célèbre, qui se rend à Manille pour honorer une vieille promesse. Entre deux ingurgitations de bêtabloquants et de Viagra, ce héros vieillissant et infirme poursuit un voyage entre réminescences oniriques de son enfance et pérégrinations réelles, du Japon aux Philippines. Au cœur de son odyssée, s'ajoutent des personnages déjantés, une mère et sa fille nymphomanes, un jésuite pratiquant l'auto-flagellation, une sœur qui lit dans les pensées, et surtout beaucoup de chiens. 

    Mais - et malgré ces ingrédients prometteurs - Avenue des mystères s'essouffle rapidement. Il s'étire et se charge, sans rien apporter à la résolution de l'intrigue que l'éclairage du surnaturel; une magie un peu baroque pour justifier ces manques. Non pas que cet argumentaire soit une critique, au contraire, le réalisme magique a toujours de quoi ravir mon imaginaire. Mais ici, il s'éparpille dans un grand bric-à-brac composé de fantômes, de rêves, de presciences et de miracles; sans rien n'apporter de plus que sa saveur surréaliste et poétique dans un récit inutilement long, cacophonique et parfois confus.

    Cependant, dans cet imbroglio où le temps de la narration est fragmenté, parfois enchevetré, entre le passé du héros et son présent, le talent de conteur de John Irving se décèle. Car un tel auteur ne jouit pas de notoriété pour rien : même dans Avenue des mystères, le style, l'art de la narration, l'originalité sont indéniablement là. Si ma lecture s'est vue parasiter par l'essoufflement et l'incompréhension, je ne peux nier que l'écriture, en elle-même, empoigne le lecteur. Car, oui, elle embarque. Non pas seulement par sa fluidité et sa prise en main accessible, mais par sa manière de raconter. Malgré les alternances d'une histoire à l'autre, les digressions didactiques sur les cas de rage chez les lions ou sur la religion, John Irving sait manier le récit et propose une incursion singulière dans son imaginaire. 

    J'ai aimé tout en ne l'ayant pas aimé. Ce roman -qui n'est pas le plus abouti du corpus de John Irving selon les critiques - flirte entre le raté et le brillant; car dans ce qui ne marche et n'atteint pas, s'entrevoit la qualité de l'écriture et la richesse de l'univers. 

    En gros, mon raté à moi, c'est d'avoir découvert John Irving par le mauvais titre. 

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